La première Grande Armée
Le service de santé
Le service de santé de la Grande Armée comprend une poignée d'hommes de haute valeur, tant chirurgiens que médecins, comme Larrey (surnommé « la providence du soldat » mais malheureusement, un peu trop partisan de l'amputation), Percy ou Desgenettes, mais il souffre d'une pénurie de moyens incroyable, en grande part pour les mêmes raisons que celles qui marquent le ravitaillement général. Le peu de matériel existant relève non des officiers de santé, mais des commissaires des guerres de l'intendance, et cette absence d'autonomie paralyse l'organisation du transport des blessés.
L'évacuation des blessés a généralement lieu sur des brancards improvisés avec des fusils ou des brancards ; les compagnies d'infirmiers militaires ne verront le jour qu'après Wagram. Toutefois, dès le début de l'Empire, Larrey se préoccupe sérieusement du problème et conçoit des divisions d'ambulances volantes comprenant chacune 12 voitures légères, couvertes, bien suspendues et bien aérées, les unes à deux roues pouvant transporter deux blessés allongés, les autres à quatre roues capables d'emporter quatre blessés. À côté de ces ambulances de Larrey font apparaître les « caissons de Wurtz », préconisés par Percy, qui sont de grands coffres roulants très maniables, tractés par six chevaux et contenant les moyens de secours pour 1200 blessés, avec quatre chirurgiens et aides, montés à califourchon sur le coffre pendant les déplacements. Mais ce matériel si utile, réalisé en trop petite quantité, restera la plupart du temps au seul service de la Garde impériale.
L'organisation théorique n'est pourtant pas mauvaise.
On y trouve :
- des divisions d'ambulances volantes, qui sont affectées aux divisions d'infanterie, de cavalerie et d'artillerie et qui s'occupent du ramassage des blessés de leur division, de leur transport vers les dépôts d'ambulance (ou à défaut vers les églises ou les monastères les plus proches), ainsi que de l'enterrement des morts.
- des dépôts d'ambulance, qui sont des hôpitaux temporaires divisés en hôpitaux de ligne (répartis sur trois lignes de plus en plus éloignées du champ de bataille, ils reçoivent les blessés des ambulances) et en hôpitaux spéciaux (pour les galeux et les vénériens),
- et enfin, des dépôts de convalescence (pour les soldats convalescents).
Chaque régiment est assisté d'un chirurgien-major, de 4 à 5 aides-chirurgiens et de plus, dans la cavalerie, d'un vétérinaire. Mais, en dehors de la Garde impériale, ces praticiens sont en majorité des opérateurs empiriques ou représentent le rebut de la médecine, et pour tous les soins d'urgence, ils n'ont sous la main pour chaque régiment qu'un caisson contenant 54 kg. de linge à pansements, 12,5 kg. de charpie et une caisse d'outils à amputation.
En arrière de la ligne de combat, lorsque les dépôts d'ambulance de la Grande Armée sont débordés ou pleins, les blessés sont acheminés soit dans les hôpitaux des pays occupés, soit à défaut, dans les couvents ou les églises. Ce sont alors en majeure partie des médecins allemands, voire de nationalité ennemie (prussiens ou autrichiens) qui prodiguent leurs soins, presque toujours avec un grande dévouement et parfois même avec un désintéressement qui les rendront dignes d'éloges.
Les conditions d'hygiène y sont généralement lamentables et les épidémies de typhus et de dysenterie y tuent plus que la mitraille sur le champ de bataille.
Le 1er septembre 1805.
Décret définissant la composition des caissons d'ambulance.
Chaque caisson doit contenir :
- deux matelas,
- six brancards de sangle,
- une caisse d'instruments de chirurgie,
- cinquante kilos de charpie,
- une caisse de produits pharmaceutiques (agaric de chêne, vitriol blanc, colophane pulvérisée, eau-de-vie camphrée, acide acéreux, liqueur d'Hofman; laudanum liquide et alcool volatil).